À la poursuite d'octobre rose
e sens la culpabilité poindre le bout de son nez, à la question si j'ai participé à la marche contre la cancer du sein. Je bredouille une absence, puis un doute sur la date. Comme si quand on avait connu le crabe, on devait de manière systématique participer à tout ce qui lutte contre lui.
Difficile pour moi de rentrer dans ce carcan qui veut qu'on se batte uniquement contre ce qui nous touche de près. Si je devais m'investir contre une maladie et/ou un handicap ce serait pour ce dont je m'estimerais être le plus éloignée, histoire d'être objective, de ne pas m'appesantir sur ce que je suis censée connaître. Cette marche dont les hommes sont absents ne m'a pas non plus inclinée à y participer. Le cancer du sein n'existe t'il pas pour l'homme aussi ? Doit-on le quantifier lui aussi pour décider si oui ou non la gente masculine est légitime pour participer à toute initiative le concernant ? N'y a t'il aucun mari, père, ou fils qui aurait aimé marcher pour une femme proche ? Je cesse de me poser ces questions me préoccupant plus que la cause en elle-même.
J'observe après coup ces multiples t-shirt roses en les remerciant muettement. Le letrozol est désormais mon berger, avec son lot d'effets secondaires n'appartenant plus au cancer, puisqu'on a décidé pour moi qu'il se situait depuis deux ans maintenant, dans le passé. Les douleurs musculaires et plantaires ne semblent rien en avoir à foutre, pour elles le passé, le présent ou le futur ne signifient rien du tout, elles sont là en permanence, intemporelles sur la feuille de route d'une vie réduite à une extrême fatigue, petite mort journalière dont je me dois de m'accommoder, voire honorer puisque j'ai la vie sauve.